dimanche 15 avril 2007

Dix toupies

Je me réveille certains matins et je me sens comme d’Artagan ou Cyrano de Bergerac, j’ai le goût de croiser le fer avec un enfoiré, d’assommer un idiot (lui-même assommant par la force des choses), et de déboulonner des statues.
Je sortirais mon épée et, sloup!, d’un coup majestueux, je t’étêterais l’anacoluthe avant qu’elle ait pu prendre son élan. Et je recouperais chacune des parties ainsi créées en de multiples sous-sections sans âme (car il faut faire attention : l’anacoluthe est comme le ver, elle survit même coupée en deux, chaque segment est autonome…).
Donnez-moi un Saddam Hussein pour que je puisse en bon soldat de l’oncle Sam faire basculer sa statue et chanter un hymne à la victoire (tiens! hymne et hymen sont des anagrammes). Celle des forces de la lumière contre l’obscurantisme ambiant.

Take me out to the ball game,
Take me out with the crowd;
Buy me some peanuts and Cracker Jack,
I don't care if I never get back.


Croiser le fer. Oui.
Et je ne parle pas seulement de le faire avec le directeur du département des arts du texte, M. Surprenant qui veut à tout prix me voir (oh! quelle surprise…), ou avec cet étudiant miteux, Lucien Lecerf, qui se croit tout permis parce qu’il est mégalomane, et qui ose se plaindre dès que ses élucubrations se retournent contre lui.
Non, je vise ces êtres qui font de l’ignorance la valeur suprême.
Le mauvais parler, la phrase lourde et maladroite, les pensées sans fondement abondent comme de la volaille, et il faut s’enfermer dans sa chaire pour ne pas être contaminé.
Je dis : nous sommes en pleine dispotie.
En fait, je voulais dire : face à dix toupies, comme si on pouvait jouer aux quilles avec le tissu social.
Soyons clairs : la toupie est unique, tandis que les dix toupies, elles, sont légions. Et elles se multiplient comme des vers.

Je sors mon glaive, ma noire rapière et mon scramasaxe.
Je suis seul contre une déferlante de fer blanc.
Mais c’est du toc et j’ai mon estoc.
Je me dérobe à la défervescence.
Bouchons les dalots pour retenir les eaux.
Comptons tous nos abats, et apprêtons-les sans réserve.
(coudon, qui a joué avec ma prescription?)
Rêvons d’étreintes nocturnes, de blocs et d’urnes éteintes.
Plaçons le sabre avant le carré et retenons des chiffres.
Je ne suis qu’une soustraction.
Heureusement qu’il y a de la lumière au fond de l’entonnoir (traduction bâclée de « there’s light at the end of the funnel »).
Je ne veux pas de prose accablante, mais des Prozac en quantité suffisante.
Je me sens écervelé. Comme une anamorphose de moi-même.
Je croiserais l’acier avec le cerveau, pour en faire une âme trempée.
Donnez-moi, quelqu’un, un moulin pour que je fasse du vent.
Stop ou encore.
Tout évaporé dans Villeray.

9 commentaires:

Anonyme a dit...

Franchement éberluant, cher collègue. Puis-je me présenter?

Oui ou non ? Meunon direz-vous? Dommage et je signe:

Henri, prof Paris VII

Anonyme a dit...

Toupie, c'était le nom du chien de mes parents. En fait, c'était une chienne. Imaginons en dix: ça tourne en tabarnak!

Anonyme a dit...

À propos de toupie, mon fils qui souhaite étudier en pays du Québec, ne cesse de tourner en rond. Mais je sais que, grace à vos bons offices, l'Université de Villeray à Montréal tourne rondement et est reconnue, voire hautement réputée, pour ce qu'elle est.

Je suis moi-même un homme de lettres, facteur de mon métier au Lac-des-Quatre-Cantons, près de la cité suisse de "Geneviève", comme vous dites si bien par chez vous! Hé! Je frémis littéralement d'enthousiasme à l'idée de mes prochaines lectures de votre prose villeresque.

Allez, c'est sans souci! Vive le Québec!

Antoine Delaforge

Anonyme a dit...

Toupie or not toupie, voilà la question!

Éric Lint a dit...

On peut en tout temps me rejoindre à ericlint@mac.com

Anonyme a dit...

Ça cogne en crisse, tes toupies!

Té-tu complètement reviré?

Signé: Alain doigt dans l'nez

Anonyme a dit...

J'irais jusqu'à jouer du Benjo, pardon, du Banjo, en tournant comme une toupie, deux toupies, trois toupies...

Mais au fait, pourquoi des toupies? Pourquoi pas des tapirs. T'as pire que ça? Tant pis.

LE Normand

Anonyme a dit...

Passablement ensoleillé et franchement lunaire. Une étude de cas révélatrice de l'enchevêtrement inextricable des mots et des sens mènerait directement à un plongeon dans ce texte toupien.

Uh anonym qui ne peut qu'être... anonyme.

Anonyme a dit...

Il y a un quelque chose de... métallique dans votre texte.
Zélig